Comment expliquer le succès et la longévité de Booba ?
Le rap occupe le haut des charts de l’industrie musicale depuis plusieurs années. Un rappeur en particulier a su faire preuve d’une longévité à toute épreuve: Booba, qui a traversé les années 2000 sans encombres pour être toujours au top en 2014, même si certains ont annoncé son déclin à plusieurs reprises. Le rappeur parisien, il le reconnaît lui-même, est connu pour suivre les tendances outre-atlantique et les retranscrire à sa sauce en France : bling-bling, vocodeur, etc. Sans doute une des raisons de sa longévité mais ce n’est pas la seule.
Une évolution de style
On est aujourd’hui loin du temps où Booba était cité par la Nouvelle Revue française pour ses métagores, sortes de métaphores au style abrupte et imagé qui le placerait directement dans l’héritage de Céline, rien que ça. Mais cette reconnaissance date de 2003, elle concerne donc son travail au sein du groupe Lunatic et sur son premier album solo « Temps Mort ». Ses textes étaient alors bien plus engagés et travaillés qu’actuellement, où on a plus tendance à verser dans de l’egotrip gratuit. Exactement à quoi correspond le rap américain d’aujourd’hui.
Un discours lisse
Si Booba est toujours dans le coup, c’est aussi grâce à un discours qui ne veut fâcher personne et tente de s’adresser à tout le monde, aussi bien aux mecs de quartiers qu’à ceux du 16ème arrondissement de Paris qui s’amusent sur des lyrics crus en soirée. Booba n’attaque jamais ni ne défend une communauté en particulier, qu’elle soit juive, musulmane ou bien catholique. Chacun peut très bien écouter du Booba alors qu’un rappeur tel que Rohff tente plutôt de s’adresser à un public bien déterminé.
On peut même dire que Booba est fédérateur. Il fait preuve de suffisamment de second degré pour se montrer sympathique à des couches de la société pas forcément attirées par le rap à la base. Son côté mauvais garçon et moqueur correspond d’ailleurs bien aux standards de compétition de notre société actuelle :
« Je paye ma bouteille, tu payes ta cannette, tu te fais des casse-croutes, je me fais des restaus, j’envoie des diamants à ma go, t’envoies des textos »
Il est logique que cette approche fasse plus vendre que par exemple des textes de rap conscient, qui ne sont pas bien taillés pour passer en club ou à la radio. C’est aussi une évolution très révélatrice du rap, s’ouvrant au grand public, délaissant les grands sujets de société pour se diriger vers un aspect plus festif. On est loin du Bitume avec une plume.