Loretta Strong : Voyage rétrostellaire de cuisine

Loretta Strong, une ranger de l’espace voit de très loin la Terre ravagée par une apocalypse planétaire. Les hommes-singes de l’étoile Polaire prennent d’assaut les débris de satellite qui flottent autour du plateau, et notre héroïne, seule, imperturbable et parfaitement paniquée, n’a qu’une mission à remplir : semer de l’or sur la planète Betelgeuse. Pendant cette Odyssée, elle ne pourra pas compter sur ses compagnons d’infortune, Steve Morton, rangé en pièces détachées dans le frigo, Linda, au bout du fil, qui profite de la situation pour lui faire de la bringue, et encore moins sur son élevage de rats de laboratoire, véritables violeurs de l’espace mais potentiels derniers espoirs de progéniture (certes thérianthropique) pour l’aventurière.

Soit.

Nous sommes ici les témoins d’un OVNI théâtral tout droit sorti de l’esprit chimique de Raúl Damonte Botana, dit Copi, un dramaturge Argentin francophone ayant notamment aiguisé sa plume chez Hara Kiri et Charlie Hebdo en tant que dessinateur surréaliste.

Au théâtre, il est violent, obscène, et explosif, et c’est avec sa ferveur psychédélique que Maïté Lottin nous offre sur scène ce solo épique et réjouissant.

La comédienne et metteuse en scène arpente de long en large son vaisseau spatial (à moins que ce ne soit sa cuisine ?) elle bondit, elle se fige, elle  rugit de plaisir et de douleur, elle se débat face aux éléments contradictoires d’un système solaire au bord de l’implosion. L’espace est truffé d’objets insolites délicieusement retro et quotidiens, une passoire boule à facettes, une gaine d’aération aux allures de portal, ou encore des pâtes visqueuses à la Flubber… et toute cette scénographie aux ficelles assumées nous replonge assurément dans l’imaginaire collectif des films de SF des années 70.

La création sonore riche vient parfaire le décor, faisant la part belle aux synthétiseurs modulaires, si emblématiques des balbutiements de la musique électronique.

Une question reste en suspend: qui du personnage ou du spectateur a ingéré la substance hallucinogène ?

En représentation au Théâtre la Flèche jusqu’au 28 Mars