Jean Giraud alias Moebius

Moebius : comment il a transcendé la science-fiction et la bande-dessinée

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Jean Giraud a toujours assumé une double identité : il signait Gir ses oeuvres plus réalistes et Moebius ses réalisations touchant davantage à la science-fiction. Ce second pseudonyme a remporté la bataille de la postérité, renfermant l’univers le plus profond et le plus fascinant de ce dessinateur mythique. C’est celui qui nous intéresse dans cet article.

Avec Moebius, Jean Giraud fait une référence au ruban du savant Möbius, symbole de l’infini, qui illustre parfaitement ses réalisations aux confins de l’imagination dans la deuxième partie de sa vie. Ce tournant dans son oeuvre prend corps avec la publication de la BD La Déviation et par la création du magazine Métal Hurlant en 1975, consacré à la bande-dessinée de science-fiction, en collaboration avec Jean-Pierre Dionnet et Philippe Druillet.

Moebius dessin

La BD prend une nouvelle dimension

Il ne faut pas oublier que la bande-dessinée a été, et est toujours parfois, méprisée par tout un tas d’artistes académiques, de dessinateurs ou encore d’intellectuels. Elle est associée à un style enfantin, éloignée de l’image qu’ils se font de la production artistique. Moebius va radicalement trancher avec cette approche et faire taire une partie des critiques en adoptant un style résolument adulte, avec cette finesse de trait qui le caractérisait si bien. Toute une nouvelle génération veut alors tuer l’image de Spirou et d’Astérix dans les années 70 en insufflant plus de réalisme, c’est à dire en arrêtant d’écarter des thèmes centraux comme la sexualité. Le 9ème Art explose ses propres codes.

jean giraud alias moebius

Jean Giraud renoue avec le travail des plus grands grâce à des dessins particulièrement fouillés, riches en  contrastes et en clairs obscurs. La Déviation n’est par exemple pas sans rappeler l’oeuvre du célèbre graveur Gustave Doré, qui avait d’ailleurs fait de l’imaginaire un de ses thèmes de prédilection. Moebius adopte également des partis pris graphiques parfois novateurs, tel que son travail sur les minéraux dans Arzach, où les dialogues sont quasiment inexistants.

Moebius enchaîne les succès

L’Incal est certainement le plus grand succès du dessinateur, qu’il réalisera en collaboration avec le scénariste Alexandro Jodorowsky. Parue de 1981 à 1989, cette BD raconte les aventures de John Difool, un détective privé recevant des pouvoirs extraordinaires de la part d’un extraterrestre, traqué par de multiples organisations et factions dans un futur éloigné. L’Incal connaîtra même une suite au début des années 2000 grâce à son succès.

De Moebius, on peut également citer La Folle Couronnée, toujours en collaboration avec Jodorowsky, Beautiful Life, Icare ou bien Griffes d’Ange. Il aura marqué l’univers du dessin francophone et au-delà (Etats-Unis, Japon, Europe de l’Est…), comme en témoigne son exposition commune avec Miyazaki à la Monnaie de Paris, où les deux artistes avaient dévoilé leurs collections personnelles de dessins. Petite parenthèse, l’artiste nippon, qui n’était pas avare de compliments envers Jean Giraud, a mis une pause à sa carrière suite à la sortie du Vent se lève.

Moebius dessin

L’appel du cinéma

Dès 1980, Moebius sent que le cinéma l’appelle pour mettre à l’épreuve ses talents. Il réalise ainsi les décors du film Alien de Ridley Scott et les story-boards des Maîtres du Temps, de René Laloux, et de Tron, pour Walt Disney. Malgré, la réalisation d’un court-métrage bien trop méconnu (La Planète Encore), et quelques projets inachevés de films d’animation (Le Garage hermétique, Starwatcher), Jean Giraud n’aura jamais à réussir à devenir le réalisateur qu’il aurait voulu être. Sans doute par manque de temps, tant son travail de dessinateur l’absorbait.

« Je ne dirais pas que le cinéma m’a laissé au bord du chemin, disait-il à l’automne 2010. C’est plutôt moi qui l’ai laissé passer. Il est malheureusement difficile d’avoir plusieurs vies simultanément. Faire du Mœbius sans la moindre concession tout en continuant Blueberry demande déjà un investissement interne considérable. Je me tire d’ailleurs le chapeau car j’ai réussi à me trahir sans me quitter… Bref, je n’avais pas de place à accorder au cinéma. Pour se lancer dans le cinéma, il faut être Cortez : brûler ses vaisseaux et ne plus rien avoir d’autre à faire. »

D’octobre 2010 à Mars 2011, la Fondation Cartier pour l’art contemporain à Paris, a accueilli et organisé la grande exposition « Moebius Transe forme ». Les organisateurs ont voulu montrer comment ce dessinateur génial a dépassé le simple cadre de sa discipline, en véritable artiste protéiforme qu’il était.

Exposition Moebius Transform Fondation Jacques Carties

L’exposition Transe forme à la fondation Cartier pour l’art contemporain

Moebius dessin

Moebius dessin

Dessin de Moebius

Moebius dessin

Moebius dessin

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